Journées internationales d'Analyse statistique des Données Textuelles
7-10 juin 2016 Nice (France)
Violences « genrées » et génocide des Arméniens : Les témoignages de survivants au prisme de l'ADT
Sylvia Kasparian  1@  , Joceline Chabot  2, *@  , Marie-Michèle Doucet  3, *@  
1 : Université de Moncton  -  Site web
Université de Moncton 18 avenue Antonine Maillet Moncton Nouveau Brunswick E1A 3E9 -  Canada
2 : Université de Moncton  -  Site web
18 rue Antonine Maillet Moncton, Nouveau Brunswick E1A 3E9 -  Canada
3 : Université de Montréal
* : Auteur correspondant

Depuis déjà deux décennies, les travaux menés à partir d'une approche genrée des génocides ont profité d'un renouvellement des méthodes et des questionnements. C'est ainsi que les recherches sur le génocide des Arméniens ont exploré les violences spécifiques commises contre les femmes. Dans cette perspective, les travaux des chercheurs issus de différentes disciplines ont montré que l'idéologie genrée (ou gender ideology) a joué un rôle déterminant dès le début du génocide des Arméniens avec la séparation et le massacre des hommes. Quant aux femmes, elles sont victimes de viols, d'enlèvements, d'esclavage sexuel et de conversions forcées à l'Islam. Selon plusieurs chercheurs, ces éléments font tous partie d'un programme génocidaire « d'assimilation biologique ».

À partir d'une approche multidisciplinaire qui conjugue histoire et linguistique, nous voulons interroger les récits des témoins du génocide des Arméniens en lien avec les violences sexuées perpétrées contre les victimes. L'analyse des témoignages sur les violences sexuelles infligées aux victimes du génocide des Arméniens pose plusieurs défis. Notre étude, qui en est au stade exploratoire, ne prétend pas répondre à toutes les questions que soulève cette problématique, mais plus spécifiquement, elle vise à mieux cerner les procédés narratifs par lesquels ces témoignages présentent et représentent ce type spécifique de violences. Notre corpus est composé de témoignages livrés et publiés au plus près de l'événement : une série de témoignages de victimes rescapés des massacres : hommes, femmes et enfants. Ceux-ci ont été recueillis par un tiers, transcrits et traduits en français pour un lectorat occidental. Ainsi, ce corpus constitué de six documents (témoignages de Bryce, Barby, Captanian, Naayem, Société des Dames arméniennes, Archives françaises, total : 133 372 mots) a été examiné au prisme d'outils informatiques de pointe en analyse du discours. À l'aide des logiciels IRaMuTeQ, TROPES et HYPERBASE, nous avons effectué une lecture systématique et exhaustive de ce corpus textuel grâce à la lexicométrie-logométrie[1]qui marie l'exploration qualitative et l'exploitation quantitative, permettant ainsi une analyse fine des textes. Une cartographie des récits permet de relever les spécificités des différents types de témoignages. Ensuite après un zoom avant sur le premier récit en français d'une survivante qui révèle les mondes lexicaux (l'univers des souffrances subies) du témoignage d'une femme, nous revenons aux représentations, aux mondes lexicaux liées aux femmes dans tous les témoignages à l'étude. Ces analyses, en plus de nous donner un descriptif des différents types de violences sexuées subies par les femmes (psychologiques et physiques), nous permettent de relever, à partir des procédés narratifs, le dicible et l'indicible de ces violences.


[1] Cf. D. Mayaffre, 2010, p. 22.



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